Les poésies de Nicolas Pavée

8 autres poèmes du recueil "Classico-modernisme" (2006)

SUR SON ÎLE

 

2 heures du matin, il va faire un jogging

Avec son courage et sa femme puis Théo,

Son fils de 10 ans qui se croit à Bornéo,

Sur son île aux pensées rêveuses de camping !

 

Dans la végétation luxuriante, en forcing,

Il gonfle ses poumons devant un paréo,

Avec un disque ancien au son en stéréo

Qui sort d’un magasin en ville, du shopping !

 

Ses mains plantent la tente et des légumes verts

Pour vivre au jour le jour devant les palmiers

En jouant sur la plage un pion sur un damier :

 

Un coquillage mort au souffle recouvert

De sable, au chant pleureur des singes, du hamac…

Et dans les refrains stridents de son estomac !

 

 

Le 2 mars 2006.

 

 

UNE ARMOIRE A GLACE PEU COMMODE ?

 

On reconnaît un gars pour sa force physique,

Pour son slip mal lavé devant deux, trois moteurs,

Qui bricole toujours le compteur, en musique,

De sa moto qui se transforme en réacteur !

 

On reconnaît un homme en forme pour sa flemme

Devant une télé munie d’un cendrier

Et d’un petit pastis pour les soirées qu’il aime

Avec du football qui roupille dans ses pieds !

 

On reconnaît un type en peine pour sa joie

De s’être séparé de celle qui parlait,

Loquace, avec des mots d’insulte comme une oie…

On confond un bon gars pour un marchand de lait !

 

On reconnaît un mec pour de la solitude,

Pour d’irréelles mains frappant sur son moral,

Sans aventure, aucune ! On le prend d’habitude

Pour une armoire à glace au blason carcéral !

 

Il n’en est rien ! Pourtant, il semble peu commode

Lors d’un buffet trop froid, assis face au dressing

Et devant son épouse austère que la mode

Refuse en oubliant son look et son piercing !

 

On reconnaît un homme heureux pour sa chemise

Ouverte avec un torse avide de canons,

De femmes, de nature et de lettres émises

A l’intention, hélas, de portes de prisons…

 

Le 29 octobre 2005.

 

 

LE PORTE-DOCUMENTS

 

Le porte-documents ne porte que des feuilles

D’arbre jaune où s’attarde un écho de journal

Sur un sèche-cheveux ou bien un tribunal,

Une lettre fichue, de fautes ou de deuil !

 

Il contient de quoi mettre un reg seul dans les larmes,

De la publicité, des news sans intérêt,

Aussi la nostalgie, les guerres et les armes

Parmi la vente de salons et les décrets !

 

Des feuilles A4

Chantent l’enfer

Facture en plâtre

Chiffres d’éther

 

Le porte-documents a de l’inspiration

Aucune page blanche aucune défaillance

Des rimes sans passion

Et aucune brillance

 

Des feuilles A4

Chantent l’enfer

Facture en plâtre

Chiffres d’éther

 

Voici les journaux à l’annonce impondérable :

A vendre : un chat perdu qui répond à ce nom :

« Reviens » Pauvre matou qui s’échappe ! La table

Est mise ! Une croquette est boulet de canon !

 

(Du n’importe quoi !)

 

Des feuilles A4

Chantent l’enfer

Facture en plâtre

Chiffres d’éther

 

 

Le 3 décembre 2006.

 

 

UN COMBAT SANS MERCI

 

Il se lavait avec son gant

De boxe en essuyant

D’un revers de la main

Sa bouche pâle de brigand

Sous le gong de son vaillant

Torse de gamin

 

Car il saignait de la vinasse

Avec son rasoir électrique

Et son poil dru se montrait glace

Froid sous les yeux blancs du miroir

Dans le psyché de son espoir

A la barbe d’un air de musique

 

Un duel acharné réclamait la victoire

Entaillé sur les joues il luttait sans histoire

Avec le plus docile et parfait adversaire :

Sa personne et son corps décuplé de viscères

 

Le 6 mars 2006.

 

CHANTEUR DU DIMANCHE

 

Le chanteur fait une reprise

A son drap pour dormir tout bas !

La clé du succès se révèle à sa portée

Comme les clés de fa, de sol qui l’autorisent

A sortir un hautbois, un trombone, une flûte

De champagne, en silence, en musique avortée !

 

Le chanteur pour hausser la voix :

Il connaît la musique

Quand il enchaîne des tubes

Et son VTT au lampadaire

Près du parc Monceau,

En sifflant des notes sur son calepin

Mouillé par une averse d’avril !

 

Il compose, tranquille comme Baptiste,

Ses chansons et ses tubes

De dentifrice sont vides

Pour des dents de star et de succès

Derrière des boules quiès

D’un travail de Pénélope !

 

Le 8 mars 2006.

 

 

CONTEUR D’ELECTRICITE

 

Il était une fois un gars déconnecté

De la réalité qui rêvait, sans complexe,

Des amours très branchées aux prises de l’été

Mais aussi des hivers et du givre qui vexe

 

Comme des cheveux blancs qui collent sur les yeux !

Il semblait au courant de l’ennui point aimable

Qui s’installe en le couple en des scènes de vieux

Et savait l’éphémère amour, pétait un câble,

 

Electrique et hélas lâchant prise ou craquant

En se tournant vers elle : une femme juteuse !

Il était une fois un lion, premier décan,

Qui dévorait le coup de foudre des chanteuses

 

Pour ignorer le temps qui passe et le ruisseau,

Le courant qui l’emporte jusqu’à l’autre ride

Et qui se presse en se cognant dans un ponceau,

Dans le déroulement funèbre de son vide !

 

Le 13 décembre 2005.

 

 

DES TALONS CACHES

 

Ses talons ne me bottent pas

Car dans les fesses ils m’agressent

Ce n’est pas le pied ni le pas

De mon voyage vers la Grèce

 

Vous avez des talons cachés

Lui dis-je au Publiphone

En criant « help ! » comme amoché

Amorphe et presque aphone

 

Je pars sur ma pinasse

Fuyant quelques morues

Pour l’air et la bonace

Sans filles de la rue

 

Vous ne m’arrivez pas à la cheville, Miss !

Mes muscles, c’est le pied !

Vous êtes le gin-fizz

De mes amours perdues, mes noces de papier

Froissé !

Lui dis-je avec mon pied de nez et mon passé

De pied ferme

Aux thermes,

Au terme

D’aventures sans rencontres

Dont je fus contre-

Toi, prêt à pardonner…

Sans donner !

 

Voici mon pied-à-terre au pied d’une montagne

Qui tourne les talons !

Je pars et je me magne !

Voilà quelques sofas et un petit salon

De coiffure

Avec des femmes qui m’attendent, moins dures,

Sans trop paraître contre !

 

Le 9 mars 2006.

 

 

 

J’IRAI CRACHER SUR VOS BOMBES

 

J’irai cracher sur vos bombes

Et sur vos guerres de gangrène

Pour au soleil partir en trombe

Comme un vif lapin de garenne

 

Ô guerres abruties ô fardeaux inconscients

Vous endormez le monde et sombrez suppliant

Dans les fétides fleurs

Des esprits voleurs

 

J’irai cracher sur vos bombes

Et faire un foin à vos mémoires

Avant que les soldats ne tombent

Dans les jupes du conflit voire

Dans les robes de guerre à boire

Avec le vin rouge des combes

 

Autour du char j’irai cracher

Avec que des pâles clameurs

Comme un thon trop mal repêché

Dans mon filet de voix qui meurt

 

Sur le fusil j’irai cracher

Sur les images peu scolaires

Sur les canons graves tachés

De sang nu du coucher solaire

Mais je ne suis pas un héros

 

Ô guerre ô prison ahurie

Tu ruisselles comme les veines

Dans la scène en furie

Des vents qui traînent

 

Sûr de l’amour j’irai cracher

Sur les canons et la mitraille

Dans l’existence qui déraille

Sur les obus comme amochés

Sur les chars latents et escrocs

 

J’irai cracher sur vos bombes

Sur vos massacres en guirlandes

Quand la vie ne sera que tombe

Et l’Eden un jardin de landes

 

Le 15 février 2006.



25/08/2007
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour